Je me souviens…

Je me souviens… de Tata Mone

Ah, il y a une personne dont je n’ai pas encore beaucoup parlé, pourtant cette sainte femme, en vaut la peine. Il s’agit de Tata Mone ou plus concrètement Tante Simone, la sœur de mon Papa, née à Lille et décédée à Arras en 1978, quelque temps avant son fils, sans doute de chagrin.
Tata Mone tenait une épicerie rue Saint Michel, à côté de la maison de ma sœur et de mon beau frère, là où actuellement se vend des produits italiens.

Je me souviens… de cette Tata… Tata Mone représentait la bonté même, la vraie bonté personnifiée, une gentillesse à toute épreuve.
Tata Mone s’est mariée à un cultivateur, excellent garçon Robert Démolin et en début de mariage, ils avaient repris une ferme à Lucheux , dans la Somme. J’y suis allé souvent en vacances car Tata Mone me gâtait généreusement et particulièrement.

Je me souviens… qu’en saison, elle me donnait des pépins de melon afin que je les sème dans son jardin – rien n’a jamais poussé hélas !
Dans cette ferme, je jouais dans l’immense cuisine sur la gauche de l’entrée ou dans la grande salle à manger, en face, à droite. Je dormais dans une très grande chambre à l’étage, j’étais très heureux et Tata Mone œuvrait sans répit à la ferme, Simone et Robert eurent un fils : Maurice, dont l’épouse est devenue la marraine de notre dernier Jean-Luc.
La grand porte de la cour de la ferme était haute et lourde avec des ferrures impressionnantes. Au cours d’une tempête, cette porte s’est rabattue sur mon oncle Robert, grièvement blessé, il décéda très rapidement après.
A la suite, notre Tata Mone , courageuse, voulu tenir la ferme seule, mais cela ne put durer et elle revint sur Arras près de son frère, où d’abord, elle logea petite place, pas loin de chez nous (ce devait être au dessus de l’ancienne boulangerie François , là où Vidocq vécu à Arras et y vola du pain).
Tata Mone venait aider Maman, dans son épicerie avant de reprendre elle-même une épicerie à l’angle des rues Noël Tranin et Saint Michel (déjà cité). Elle eut un mérite incroyable : se levant très tôt chaque jour pour tirer sa lourde charrette jusque chez Rosello , grand’place, le grossiste en légumes et primeurs ou encore jusque chez Lefebvre, rue Paul Perrin, grossiste en pâtes et semoules diverses, ou encore chez Levast, un autre grossiste du Boulevard Faidherbe !
Son commerce fonctionnait bien, mais son magasin semblait trop petit car elle vendait de tout : fruits, légumes, épicerie, vins, lait, beurre, charcuterie etc. droguerie, confiserie, bonbons…

Durant la guerre, les allemands se ravitaillaient parfois chez elle car Tata Mone vendait d’excellents produits et s’approvisionnait avec de rares produits dans le commerce, à cette époque, tel que le fameux cognac « Otard » ou  » Hennessy », très prisés par les armées d’occupation. Ma sœur et moi, allions lui chercher à Lille des produits qu’elle ne trouvait pas sur place ; pour cela tous deux, nous montions dans un camion un peu poussif, des établissements Douchet, alors très gros grossiste en quincaillerie et marchand de fer (nous nous ravitaillions à Seclin puis dans la banlieue sud de Lille, pour ce genre de marchandises).
Les Douchet, nous sommes devenus amis, bien plus tard, avec le fils, devenu PDG, lorsque nous organisions les quêtes pour les enfants inadaptés des environs d’Arras, tout ceci, dans les années 60, avec nos fameux amis Hersant (déjà cités).

Bref, nous étions heureux de grimper dans ce camion et rendre un sacré service à notre Tata Mone. Cette dernière arrivait à se procurer de tout, durant la guerre, pourtant nous étions tous rationnés… nous avions même des tickets pour le savon ainsi que pour le tabac.

Je me souviens… qu’à cette époque, alors que nos fiançailles débutaient, Tata Mone aimait beaucoup Janine, ma chérie. Elle lui offrait du beurre, et même une fois un jambon entier (suprême cadeau en ce temps de disette).

Lorsque nous étions mariés, pourtant partis sur le Touquet, Tata Mone nous donnait une multitude de tickets de rationnement et nous avions deux épiceries pour les déposer car nous ne voulions pas attirer l’attention d’un seul commerçant.

Plus avant, alors que j’étais encore à Estrée-Blanche, je pouvais même fournir des tickets de rationnement pour plusieurs fumeurs de tabac !

Je me souviens… que, souvent les dimanches, Tata Mone venait manger chez nous rue du Commandant Dumetz puis rue Jules Mathon ; j’avais le droit, seul , d’aller sur le trottoir pour l’attendre mais pas plus loin que la pharmacie Jupilet (actuellement tenue par la pharmacienne Galletout). Et je voyais notre tante, arriver les bras charger de tout. Elle nous gâtait tous énormément (elle continua toute sa vie, jusqu’à gâter nos enfants surtout Jean-Luc).

Papa, mon père, tenait la comptabilité de sa sœur, mais hélas il n’avait que de petits ennuis avec sa caisse car Tata Mone , trop bonne, se faisait rouler, elle faisait crédit à toute la cité Goudemand (actuellement, rue Philippe Gerber, au fond de la rue Noël Tranin, là où habite Colette Duhin, la fille de ma sœur, donc ma nièce).

Hélas Tata Mone est décédée… comme tout le monde, et notre peine fut très grande !
Son fils a tout vendu et lui même, est décédé d’un cancer généralisé à la clinique « Bon Secours », place de la préfecture (celle-ci déménageant pour 2002 à la sortie ouest d’Arras, dans la zone d’activités des Bonnettes). Maurice était le parrain de Francis, son épouse Gisèle, la marraine de Jean-Luc.

Je me souviens… qu’étant jeune, Maurice, brave type tout de même, avait attrapé la tuberculose ; il venait se reposer chez mes parents, rue Jules Mathon. Maman n’était pas infirmière mais elle allait soigner un des fils Serusier, alors que ses parents (à lui) tenait une épicerie « Dreux » au coin de la rue du Commandant Dumetz et de la rue Jules Mathon, elle soignait bien d’autres personnes dans le quartier !

Maurice, mon cher cousin était marié à une très bonne et très brave achicourienne en la personne de Gisèle Boisleux. Ils eurent trois enfants et actuellement, Gisèle est veuve retraitée, toujours sur Achicourt au 3, rue Paul Hantz – vivant avec sa dernière fille Sylvie.

Revenons à Tata Mone. Ma chère Tante a payé une part de notre caveau familial. Elle est enterrée avec son frère , mon Papa, sa belle soeur , Maman et l’un de ses neveux, notre petit garçon (le 4e) Jean-Marc, jumeau de Jean-Luc. Ils sont nés prématurés le 3 juillet 1953 en la clinique Bon Secours mais ont dû être très rapidement transportés au centre des prématurés de l’époque en l’hôpital Saint Jean (là où se sont bâties les tours Saint Jean actuellement, le long de la rue Saint Aubert).
La directrice du centre des prématurés s’appelait Mademoiselle Lagarde, ce fut avec une grande coïncidence, la patronne de notre belle fille Danielle, l’épouse de Jean-Luc, environ 24 ans plus tard !!!

Je me souviens… de Roland Garros

Nous sommes, ce jour, le mardi 6 juin 2000, en plein tournoi de Roland Garros. J’ai une question à poser à tous les lecteurs : « Qui était Roland Garros ? » – un sportif, non, tout simplement un célèbre aviateur très riche qui possédait l’immense terrain à Paris, devenu Le Roland Garros national… Ce monsieur fit don de ses terrains à la ville de Paris – né le 6 octobre 1888, il mourut , abattu en 1918 sur le champs d’honneur à Vouziers.
Le 6 septembre 1912, vola à 4900 mètres d’altitude avec son avion Blériot et le 11 décembre de la même année, à 5610 mètres sur un Morane.

Je me souviens… de mon grand patron

J ‘ai toujours fumé depuis l’âge de 17 ans, jamais de cigarettes, mais toujours la pipe et parfois le cigare (heu… Jean-Luc possède une collection de plus de 6000 bagues de cigare !) et cela m’amène à revenir vers Mon Ami Antoine, il avait un réel plaisir à m’offrir un « Partagas », un vrai Havane ou encore une « patte d’éléphant » , ces fameux gros cigares.

Mon grand patron André Guilbert, patron des Grands Garages de l’Artois (la plus grande concession Renault du nord de la France à cette époque) sise rue de Lille, juste derrière la maison de la rue de l’égalité, là où se construit la grande résidence Minelle, actuellement, mon Patron disais-je, savourait également les gros cigares et à la saint André, le 30 novembre, les cadres que nous étions, lui offrions un étui de bons cigares, qu’il partageait sur le champ avec nous. Ce fut un Grand Patron.

De lui, je me souviens… alors que nous étions tous deux, à la porte d’entrée du grand garage, arrive un homme qui nous adressa la parole en disant :
– « Je veux voir le Patron. »
– « C’est moi dit Monsieur Guilbert, tu veux travailler ? Que faisais-tu avant ?  »
–  » Je sors de prison. », dit l’ homme et le patron reprit.
– « Tu ne recommenceras plus ? Alors viens demain, je t’ engage. »
Formidable n’est-ce pas ; le passé de cet homme ne fut connu que de nous deux et ce dernier nous donna entière satisfaction en qualité de mécanicien.
Je pense que ce beau geste d’André , était à relater.

Je me souviens… d’Antoine

Je fais le tour de mes idées et pense avoir parlé de tous les miens y compris de ma brave grande sœur qui m’a tant gâté de nos beaux parents, de nos enfants, de ma jeunesse, enfin de mon adolescence etc. que sais-je encore ?
Mais je suis sûr que j’oublie de nombreux petits faits… ainsi,

Je me souviens… d’un grand grand ami parmi tant d’autres, je veux parler d’Antoine Petit. Je l’avais eu comme professeur en Hollande chez les frères ; il n’a pas eu de chance dans son ménage. Il demeurait sur la grand’place, pas loin de chez nous, puis par la suite rue du Crinchon, près de la caserne des pompiers, et après plus au centre ville, rue des Capucins, pour terminer sa belle vie en la maison de retraite « Mahaut d’Artois », rue du marché au filé… Nous invitions souvent Antoine à manger, il se faisait un plaisir d’apporter le vin car il était par la suite un grand marchand de vins – c’est un peu grâce à lui que je me suis constitué une aussi belle cave.
Antoine, nous pouvions lui faire toutes les farces. Alors qu’il était des nôtres, lors d’un bon repas chez Charles Legay mon beau frère, Antoine était venu avec sa fameuse 2CV, la soirée s’éternisant, fort bien arrosée ; avec un autre ami présent, Louis Hersent (également décédé en 2000), nous lui avons coupé les bretelles et la cravate, mis dans la baignoire tout habillé et pendant ce temps, nous avons déplacé sa voiture sous le porche de la préfecture, encombrant l’entrée du préfet et nous avons ôté les quatre pneus… que de sacrés garnements que nous étions une fois en goguette ; je reconnais que cette farce ne fut pas chic mais on s’amusait comme des jeunes petits fous à cette époque là , soit dans les années 60 (1960/1965).

Antoine nous recevait dans ses différentes adresses, et son domicile relevait toujours d’un sacré cirque quant au rangement… il y en avait partout comme chez presque tout vieux garçon, mais Antoine avait un cœur extraordinaire, plein de bonté, de partage, et il possédait une culture riche !
Un jour, Janine, mon épouse lui dit : « Antoine, si tu veux, je viendrai ranger ton appartement de la rue du Crinchon » – sur son acquiescement, ce fut fait, Janine s’en était bien sortie mais au retour d’Antoine , celui ci affirma : « Non, plus jamais çà, je ne retrouve plus mes affaires trop bien rangées ».
Que je te comprends Antoine, car seul, on ne dérange rien et l’on retrouve tout à sa place…

Mon brave Antoine est décédé en 1999 , j’ai eu beaucoup de chagrin, inutile de vous préciser que nous sommes allés tous à son enterrement. J’ai trouvé que sur son lit de mort, il ressemblait curieusement à François Mitterand ! Antoine n’aurait pas été content de cette comparaison, lui le fervent monarchiste – à deux , nous poussions souvent la romance des « camelots du roi » !
Sur sa fameuse voiture, Antoine avait fait peindre par un spécialiste, en bon représentant en vins : « Si le vin était mauvais, Dieu ne l’aurait pas fait si bon » – ainsi, Antoine était connu de toute la ville !
Antoine ne se gênait pas dans les réunions politiques ou catholiques pour affirmer ses positions et je me souviens qu’un soir, à la mutuelle, boulevard Carnot, au cours d’une conférence, il s’était exclamé en disant : « Seigneur, donnez-nous de bons et saints prêtres » – c’était déjà la décadence de la religion catholique ; hélas cela n’a fait qu’empirer et aujourd’hui , l’église catholique se plaint du manque de prêtres…

Pour terminer sur Antoine, celui-ci avait de sérieux dons de comédien et je me souviens de sa déclaration extraordinaire de la tirade des nez, dans Cyrano de Bergerac !

Tournons la page, amis après tout, ce sont mes mémoires que j’ écris.

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Méta